Psycho-logique
Avez vous déjà ressenti cette sensation que tout autour de vous tourne au ralenti?
Ce
vertige qui, un bon matin, vous fait vous dire: "Mais je respire, mais
j'existe!" Cette angoisse en vous regardant dans le miroir, que vous
n'êtes qu'une personne parmi tant d'autres, que si vous n'étiez pas là,
ça ne changerait rien... Vile vie humaine!
Moi j'ai grandi dans
un milieu sectaire, enclavée entre mes 4 sœurs et mes parents-pantins.
Secte... ce mot fait peur. Mes parents en ont été les premières
victimes, et mes sœurs et moi avons hérité de leur "choix" imposé.
Liberté de religion, de conscience, de penser...
"Tout homme naît libre"; voilà comment commence notre Constitution.
Pour
moi, il n'y a pas eu de liberté de grandir. Les bonheurs de l'enfance
dans certains milieux n'existent pas. Tout était dicté: les choix des
plus complexes au plus simples, comment se comporter, comment être,
jusqu'au bout des ongles. Avec, comme gratification, un petit peu moins
de culpabilité, car, comme toute bonne secte qui se respecte, on n'en
faisait, quoi qu'on fasse, jamais assez.
"On dit que notre liberté commence là où s'arrête celle des autres".
Moi je n'avais pas de liberté, puisque la mienne commençait avec celle des autres.
Il
fallait que je sois parfaite, pour ne pas faire de soucis à mes
parents. Il fallait que mon père me frappe, moi et seulement moi et pas
mes petites sœurs, pour les soulager, autant Lui de son trop plein de
tension que mes sœurs pour qu'elles ne souffrent pas. Il fallait que je
sois irréprochable à l'école, pour donner bon exemple de la secte. Mes
décisions étaient celles de la secte, ou bien dépendaient du bien être
des autres.
Décider par moi dans certains domaines même les plus
simples m'est encore aujourd'hui très difficile. Le facteur "autre" y
est encore trop présent.
Et quand je sens que j'ai pu manquer à "ce
devoir", alors l'angoisse m'envahit. Il faut alors à tout prix que je
me fasse pardonner, que je me rachète.
J'ai le sentiment d'exister pour les autres.
Un
jour, mon beau-père m'a dit très gentiment: "Marie, arrête de porter le
monde sur tes épaules". Il m'avait bien cerné. Oui je voulais être un
cadeau, une source de joie, faire pour les autres et non pour moi.
C'est tellement ancré que je ne sais penser autrement...
Et puis, il y a ce jour où l'on se rend compte que ce n'est pas cela la vie, que depuis le début, on se trompe.
Oui, moi, naïvement, je croyais que les autres fonctionnaient comme moi. Qui dit attentes élevées dit grosses déceptions.
Eux, ils vivaient pour eux. Moi, je vivais pour eux. Et moi, qui vivait pour moi?
Je
me suis tellement niée qu'on remarque à peine ma présence. Je suis
translucide, on lit à travers moi comme dans un livre ouvert.
Je me suis perdue dans tout ce méli-mélo. Plus j'y pense, plus je me rend compte que les nœuds sont trop entrelacés pour espérer les défaire. Plus je veux m'en sortir, plus je m'enfonce.
A l'hôpital, un homme m'a dit: "tu as l'air si fragile, tellement perdue Marie"
C'était
le premier "compliment" que j'acceptais. Compliment? me direz vous?
Oui, compliment, car j'ai eu le sentiment qu'enfin quelqu'un
s'intéressait à moi pour moi. Car, oui, ça, c'était moi. Fragile et
perdue...
Cet homme m'avait pris, le temps de l'hospitalisation,
sous son aile. De longues minutes, il me faisait part de son expérience
d'éducateur, quand il a rencontré des jeunes sortants de sectes qui
étaient comme moi, fragiles et perdus.
Ca me faisait chaud au cœur: oui, je n'étais pas la seule à fonctionner différemment. Il y avait les autres, et les comme moi.
Je me suis alors mis en tête de les chercher, de les trouver, et de m'en faire des alliés.
Si
eux vivaient pour les autres, alors peut être qu'enfin quelqu'un vivra
un peu pour moi. Comme s'il faille que quelqu'un prenne mon corps pour
vivre à ma place...
Mais, de cette façon, le problème n'était en rien résolu... au contraire, je m'y enfermais.
Quelqu'un m'a dit un jour: "dans chaque être recèle un trésor".
Dans
chaque être? Même dans les autres? Ceux qui s'étaient moqué de moi? Qui
m'avaient jeté des pierres? Ceux qui m'avaient bourrés le crâne de
peurs apocalyptiques? Ceux qui, alors que je m'efforçais d'être
agréable, d'être polie et souriante, me le rendaient tout simplement en
m'ignorant ou en me méprisant?
Alors, je me suis penchée sur la
psychologie. Là, j'y appris que, vu que chaque personne avait un vécu
et une personnalité différente, chaque personne réagissait différemment.
Mais alors, pourquoi toujours cette sensation de paraître toujours bizarre, inadaptée à la vie actuelle?
Cette vie, je la haïs tant... je la hais autant que je peux l'aimer....
Maintes fois je m'en suis voulue, maintes fois j'en ai voulu aux autres de ne pas faire attention à moi!
Alors je me dit que peut être s'ils avaient eu ma vie,.......
peut être que je ne m'en sors pas si mal que ça finalement...